"Ici et ailleurs" du JDJ N°408

Première stratégie européenne …

Pour la première fois dans son histoire, la Commission européenne a élaboré une stratégie pour les droits de l’enfant que l’on peut qualifier d’ambitieuse.

Alors qu’un·e coordinateur·trice des droits de l’enfant existe depuis plusieurs années, chargé·e de faire avancer ces droits au sein des différentes instances de l’Union, cette fonction ne disposait pas de véritable feuille de route permettant d’orienter son action. Cette stratégie a finalement été élaborée après une large consultation, qui a notamment inclus des enfants.

… balayée par …

Las ! Au dernier stade de son approbation par le Conseil de l’UE, deux États membres ont sorti un carton rouge. Leur véto est motivé par la mention de l’interdiction de la discrimination basée sur le genre.

Il est inacceptable que deux États membres puissent bloquer cette stratégie sur la base d’une rhétorique ouvertement homophobe, en contradiction avec le traité de l’UE.

Les droits de la communauté LGBTIQ+ sont des droits fondamentaux et sont nonnégociables.

On sait à quoi s’en tenir, s’agissant de la Hongrie et de la Pologne et de tous ces parlementaires qui adoptent allègrement les thèses les plus rétrogrades.

…l’obscurantisme et la frilosité

Tout aussi inquiétant, de nombreuses ONG actives en matière de défense des droits de l’enfant au niveau européen n’ont dénoncé de blocage que du bout des lèvres.

Sont-elles également mal à l’aise par rapport à la thématique ? Estce une stratégie pour ménager les États qu’on espère ramener à de meilleurs sentiments sans les pointer du doigt trop directement ?

Difficile à dire, mais globalement pas très encourageant !

La traite des êtres humains …

Depuis sa création, en novembre 2002, le centre Esperanto accueille chaque année une vingtaine de nouvelles victimes.

Mais ce nombre ne cesse d’augmenter : en 2020, au total, 34 jeunes (26 filles et 8 garçons) ont ainsi été hébergé·e·s au cours de l’année, d’une moyenne d’âge en baisse (12 ans ½).

L’association observe une augmentation des suivis relatifs à l’exploitation de la prostitution et une diminution de ceux liés à l’obligation de commettre des délits et à l’exploitation économique. L’an dernier, la majorité des prises en charge concernent des mineurs victimes de trafic d’êtres humains et de violences liées à l’honneur (VLH).

… en recrudescence

Ces adolescentes subissent souvent une surveillance extrême de la part de leur père et/ou d’un autre membre de la famille, ne participent généralement à aucune activité en dehors de l’école et peuvent subir de graves atteintes physiques et psychiques dans le cas où des contacts non autorisés avec une personne de sexe opposé sont soupçonnés. (La Libre, 20/09/21)

La pandémie aux USA due à…

Avec la pandémie, la violence armée s’est encore aggravée outre-Atlantique, et ce sont les plus jeunes qui en paient le prix.

En 2020, 5.100 enfants ont été blessés par balles et 1.300 ont été tués, un tiers de plus que l’année précédente. Les enfants et les adolescents américains ont 15 fois plus de risques d’être tués dans une fusillade que dans l’ensemble des 31 autres pays les plus riches de la planète.

Près de 300 enfants âgés de moins de 11 ans ont été tués en 2020 (+ 50 %).

Et 2021 s’annonce pire encore.

… un virus en plomb !

Des chercheurs attribuent ce pic au stress exacerbé par la pandémie (insécurité financière, chômage, maladie, sans-abrisme…), à l’augmentation de la violence domestique, aux crises de santé mentale, à la fermeture d’écoles, de garderies et d’autres lieux sûrs pour les jeunes.

Ils pointent aussi l’augmentation des taux de suicide chez les adolescents et des fusillades involontaires (lorsque les enfants ont accès à des armes à feu chargées et non sécurisées à la maison) chez les enfants. Mais ce sont les homicides qui ont connu la hausse la plus spectaculaire.

Certains attribuent cette hausse aux 40 millions d’armes à feu vendues légalement l’année dernière (il y a bien corrélation). Et devinez quoi : ce sont les quartiers à majorité noire, hispanique et à faibles revenus qui ont connu la plus forte augmentation de la violence armée. (USA Today, 20/09/2021)

La faillite multiple du système

«Si l’on apprend aux élèves à respecter l’État de droit, encore faut-il que les responsables politiques soient les premiers à montrer l’exemple !» affirme Jules Gheude, essayiste politique, dans une Carte blanche (Le Vif du 23/10/2021).

Ce rappel découle du constat que les Conseils de recours externes en matière de contestation des décisions des Conseils de classe sont incapables de statuer dans les délais impartis et que les décisions sont notifiées avec un retard considérable.

Il est vrai que les dossiers ont explosé (1900 recours, soit 25% en plus que l’année dernière; avec un taux de 50% d’échecs dans certaines classes), et ce malgré la demande de la ministre de l’éducation de tenir compte de la situation sanitaire et donc que les redoublements soient exceptionnels (ce qui devrait être la règle générale).

Lorsque 12 élèves sur 24, se retrouvent en échec, c’est le système éducatif qui a failli, rappelle- t-il.

Plan d’éducation …

L’éducation aux médias et à l’information (EMI) est devenue primordiale dans notre environnement ultra médiatisé rempli de désinformation et de fake news, mais aussi de cyberhaine et de cyberharcèlement, en particulier dans le contexte de la pandémie, qui génère du stress, de l’angoisse, de la dépression, et peut mener, dans les cas les plus dramatiques, au suicide. Dans ce contexte, comment faire de ces espaces virtuels des espaces «safe»?

Une piste est de soutenir des actions et initiatives visant la sensibilisation, la prévention et la lutte contre les discours de haine et le harcèlement, soit de faire de l’éducation aux médias.

… aux médias …

Une résolution a été adoptée par le Parlement de la FWB le 20 janvier 2021 relative à la sensibilisation, la prévention et la lutte contre les discours de haine et le harcèlement, y compris dans l’univers numérique.

Elle vise à renforcer la prévention, porter une attention particulière aux discours de haine ainsi que du harcèlement, renforcer l’éducation aux médias et soutenir un modèle de co-régulation en associant le CSA et les fournisseurs de plateformes de partage de contenus en ligne.

… en temps de «fake news»

Un plan d’éducation aux médias est en cours de préparation qui s’articulera autour de quatre axes :

  1. offrir à tous les élèves et étudiants une éducation solide et critique aux médias et au décodage de l’information.
  2. évaluer et adapter le Conseil supérieur de l’éducation aux médias.
  3. communiquer, promouvoir et coordonner les projets, les acteurs et les actions dans le cadre de l’éducation aux médias.
  4. développer de nouvelles initiatives d’éducation aux médias numériques et réseaux sociaux.

En outre, il faut lutter contre le manque de suivi des plaintes par la Police et la Justice qui entraîne un sentiment d’impunité pour les victimes et les auteurs, le manque de responsabilité des plateformes, qui mettent parfois plusieurs jours à supprimer un contenu illicite.


Les bésicles de Jiji

De quelle année ?

Au Moniteur du 1er juin, un arrêté royal du 20 mai 2021, proposé par les ministres du Travail (P.-Y. Dermagne, PS) et des Affaires sociales (F. Vandenbroucke, Vooruit), dispense de cotisations de sécurité sociale les moniteurs de stages sportifs pour les jeunes, ainsi que leurs employeurs, à condition que les prestations ne dépassent pas 50 jours (au lieu de 25 jusqu’alors) sur l’année. Le texte produit ses effets le 1er janvier 2021. On lit que le Conseil d’État a rendu le 19 avril son avis sur le projet d’arrêté royal, et le Conseil national du Travail a fait de même le 27 avril. Tout va bien, sauf que, pour justifier la mesure, le préambule énonce : « À l’approche des vacances de Pâques, le bon fonctionnement des activités de jeunesse est menacé ; il est important que les moniteurs puissent au plus vite avoir la garantie de pouvoir travailler (…) ». Ont-ils couru le risque ?

Quelle belle loi cela fera !

Dans son Formulaire de technique législative, la section de législation du Conseil d’État écrit : « L’intitulé remplit deux fonctions : a) il permet de savoir directement quel est l’objet de l’acte (…) » et « Donnez à l’acte un intitulé clair (…) ». Comme son avis ne dit rien à ce sujet, on suppose qu’elle s’est délectée du projet de loi (Doc. parl. Chambre, n° 55 1999) déposé par V. Van Peteghem, ministre (CD&V) des Finances : « visant à assurer la transposition de la directive 2019/878 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 [suivent les mentions aussi explicites de 4 autres directives] et portant des dispositions diverses ». Le tout sans jamais révéler de quoi il s’agit, mais vous observerez que chaque fois, le Conseil européen n’a vécu qu’un jour.

Et en voici une autre

Le Moniteur du 21 juin a publié la loi du 2 avril 2021 « modifiant l’arrêté royal du 30 septembre 2005 désignant les infractions par degré aux règlements généraux pris en exécution de la loi relative à la police de la circulation routière, concernant le non-respect du panneau C23 ». La proposition de loi s’inquiétait du nombre de camions qui s’engagent dans des voies que leur interdit l’importance de leur masse ; grâce à cet intitulé lumineux comme le flash d’un radar, les voici dissuadés.

Un bref instant d’oubli

Dans celui du 24 juin (2021, 1ère éd.), on trouve, à titre d’erratum, le rapport au Monarque et l’avis du Conseil d’État qui auraient dû précéder l’arrêté royal du 11 septembre 2016 « concernant la coopération non gouvernementale », paru le 20 septembre 2016. Le ministre compétent était A. De Croo (VLD). Quelqu’un vient sans doute d’émerger d’un gros dodo.

Arithmétique épouvantable

Le Soir (16 juin) rend compte d’une enquête sur les violences sexuelles. « 64% des personnes interrogées ont subi [de telles violences] au cours de leur vie », ce qui est déjà consternant. Il y a bien pire : « Parmi ces victimes, 81% sont des femmes mais (…) 48% sont des hommes ». Soit 129% ? Mais non : 81% et 48% se rapportent aux femmes et aux hommes parmi la population interrogée, et non aux victimes. Comme on peut supposer que les responsables d’une recherche universitaire n’ont pas commis pareille bourde, merci à la Gazette du calcul extégral pour son résumé limpide.

Ça tombe dru

  • Des députés fédéraux Ecolo/Groen veulent bannir des gares la consommation de tabac, mais on lit dans leur proposition de loi (Doc. parl., Chambre, n° 55-2082) : « Une interdiction de fumer pour des raisons de santé ». Même si le médecin l’a prescrit ?

  • Selon Le Soir (2 juin), la Sonaca, qui fabrique des pièces d’aéronautique, est spécialisée surtout dans « les attaques de bords et les volets des ailes ». Pour les détournements d’avions ? Il s’agit des « bords d’attaque ».

  • Ibidem (12-13 juin), l’interview de J.-M. Nollet (Ecolo), mais ce sont les journaleux qui le transcrivent : « un crédit d’impôt (…) jusqu’à 225 euros nets par mois ». Payé en billets bien propres sur eux ? Dans cette tournure, net ou son contraire, brut, sont des adverbes.

  • Aussi (14 juin), « Écolos allemands : le ver est dans le fruit ». Il manque un t, comme dans « grün ».

  • De plus (21 juin), le correspondant à Londres : « Le deuxième prénom de la fille de Charlotte, fille de William et Kate, est bel et bien Elizabeth ». Mère de famille à 6 ans ?

  • Itou (25 juin), le Printemps de Bourges reprend : « Catherine Ringer dont c’était pour elle aussi le redémarrage ». Autant dire « pour laquelle aussi c’était… ». User correctement de ce relatif exige qu’on en ait le don.

  • La loi du 20 mai 2021 (Moniteur, 9 juin) modifie le Code civil dans le but affiché de préserver les relations personnelles des fratries. Atroce déception : « Les frères et sœurs mineurs ont le droit de ne pas être séparés », il ne s’agit donc que des franciscain/e/s.