L'éditorial du JDJ n°434 par Benoit Van Keirsbilck

Droits des femmes : on avance !

Le Comité des Parties (le COPA) à la Convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul du Conseil de l’Europe), chargé de mettre en oeuvre les recommandations du Groupe d’experts sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (ci-après « le GREVIO ») (bon, je sais, c’est un peu tarabiscoté), a publié ses Conclusions sur la mise en oeuvre des recommandations concernant la Belgique.

Et le moins qu’on le puisse dire, c’est que le bulletin est très positif. Et quand c’est bien, il faut aussi pouvoir le dire.

Il salue nombre de mesures et de progrès réalisés par la Belgique, et notamment l’adoption en novembre 2021 du Plan d’action national de lutte contre les violences basées sur le genre (PAN) 2021-2025 qui prend en compte les besoins spécifiques des victimes exposées à la discrimination intersectionnelle, la visibilité et l’augmentation des fonds alloués à la prévention, le renforcement de la coopération avec la société civile, la coordination interfédérale, la campagne nationale de sensibilisation aux mutilations génitales féminines, la modification du Code pénal, selon laquelle le viol est désormais fondé sur l’absence de consentement libre et l’adoption de la loi Stop Féminicide.

On peut ajouter à cette liste le développement des Centres de prise en charge des violences sexuelles et de nombreuses autres initiatives portées par la société civile, dont l’aide aux femmes sans-abri (La Fondation Fair Ground Belgium, la coopérative immobilière sociale Fair Ground Brussels et l’association L’Ilot qui ont acheté trois immeubles à Schaerbeek pour y créer un Centre de jour par et pour les femmes sans-abri).

Comme toujours, l’enjeu c’est de pérenniser ces efforts, de garantir les moyens de les mettre en oeuvre, d’assurer le suivi des mesures et notamment des mesures législatives. Et « de prendre des mesures supplémentaires – outre les références explicites quant au caractère non scientifique de notions comme le “syndrome d’aliénation parentale” dans le plan d’action national – afin de garantir que les autorités compétentes pour décider des droits de garde et de visite soient tenues de prendre en considération toutes les questions relatives à la violence à l’égard des femmes, sur les enfants ; et ce en appliquant les dispositions légales en vigueur qui prévoient la possibilité de limiter les droits de garde et de visite reconnus aux auteurs de violences ».

Ces derniers points font l’objet de décisions récentes de la Conférence interministérielle sur le droit des femmes, qui a adopté 45 mesures « pour passer de l’égalité formelle à l’égalité réelle », notamment sur la situation des enfants témoins de violences familiales (et donc largement victimes aussi), la question de l’autorité parentale du parent auteur de féminicide qui devrait faire l’objet d’une étude et plus globalement la suite de la mise en oeuvre du plan d’action 2021-2025 qui entre dans sa dernière phase.

On ne lâche rien !

Benoit Van Keirsbilck


Le sommaire du numéro 434

ARTICLES

1

Édito : Droits des femmes : on avance ! — Benoit Van Keirsbilck

3

La participation des enfants au premier sommet des enfants sur le climat — UNICEF Belgique

9

Présentation du Collectif Désistance. Ensemble pour la réinsertion — Collectif Désistance

16

Parents d’instants, par instinct — Clara Van Reeth

JEUNESSES CABOSSÉES

19

Le flic et sa larme au coin de l’oeil

21

68 marches à monter. 68 marches à descendre — Marc Chambeau

DOCUMENTS

25

Avis du 9 avril 2024 de la Fédération des services d’accompagnement en accueil familial concernant l’avant-projet de Décret relatif à la durée des mesures en aide à la jeunesse

28

Avis n° 53 du Conseil communautaire de la prévention, de l’aide à la jeunesse et de la protection de la jeunesse concernant l’avant-projet de Décret relatif à la durée des mesures en aide à la jeunesse

FICHE JDJ

32

L’autorisation parentale pour un départ en vacances à l’étranger — Anaïs Ruiz Romera, SDJ de Liège

JURISPRUDENCE

34

C.E. (XI e ch. réf.), 5 avril 2024, n° 259.406 — Exclusion pour motif disciplinaire – Établissement d’enseignement libre – Relation contractuelle – Incompétence du Conseil d’État

36

C.E. (VIIIe ch.), 28 mai 2024, n° 259.887 — Messages interpellants de professeur à élèves mineurs – Démission disciplinaire – Proportionnalité de la sanction – Pas d’erreur d’appréciation – Autonomie du droit disciplinaire par rapport au droit pénal

JEUNES À DROITS

43

Ruptures : les jeunes en parlent — Comme un Lundi asbl et Le Forum - Bruxelles contre les inégalités

BIBLIOGRAPHIE

45

Irréprochables — Milan Thomas

EN BREF

46

Ici et ailleurs — Benoit Van Keirsbilck et Milan Thomas

47

Les bésicles de JiJi — Jean Jacqmain

48

L’agenda


ICI ET AILLEURS

On like, on s’abonne …

La chaîne YouTube « Défenseur des droits de l’enfant » du Délégué général aux droits de l’enfant mérite d’être mieux connue (315 abonnés à ce jour). Elle vise à informer le public le plus large possible (des petits enfants aux tout grands adultes) à propos de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant, mais aussi à rendre compte du travail du Délégué général, de son actualité et des sujets importants pour les droits enfants.

… et on partage !

Le dernier épisode en date donne la parole à dix jeunes séjournant en IPPJ (Institution publique de protection de la jeunesse), pour leur permettre de se livrer sur la vie en IPPJ et nous expliquer le fonctionnement de l’institution qui véhicule trop de stéréotypes dans la population (et chez nombre de politiques d’ailleurs). Allons, visons les 1000 abonnés avant la fin de l’été !

Brisons le silence, soutenons les victimes

Adama Rachel Camara a écrit un livre pour expliquer aux enfants le sujet de l’abus sexuel dont elle a été victime : « Ada, la Luberne Tigrée ».

« À travers les aventures de Ada, nous apprenons aux enfants l’importance de parler et de dénoncer les abus, ce qui n’est jamais facile. Un message essentiel pour tous & toutes : le silence n’est jamais la solution ».

Plongez dans l’histoire d’Ada, une tigresse courageuse qui surmonte les épreuves avec bravoure et intelligence. Un livre pour sensibiliser enfants, jeunes et décideur·euses aux abus sexuels infligés aux enfants.

Chacun·e mérite d’être écouté·e et protégé·e. Commandez le livre : soit par WhatsApp au 0032 493 273 809, soit par email à l’adresse lalubernetigree@gmail.com.

Pour chaque livre acheté, un euro est reversé à DEI-ECPAT Belgique.

Paris vaut bien une messe …

Le 26 juin dernier, Paris Hilton s’était rendue au Congrès américain afin de défendre la réforme de la protection de l’enfance, en particulier celle pour les enfants placés. Ce n’est pas la première fois qu’elle milite contre les violences éducatives. En effet, devant les députés, la millionnaire présenta un témoignage glaçant de son adolescence : elle vécut durant deux ans dans quatre centres thérapeutiques/ de rééducation différents où elle subissait des violences physiques, psychologiques, et sexuelles.

… ou plutôt une audition …

Son cas est loin d’être isolé : le New York Times estime que des centaines de milliers de mineurs auraient vécu des violences similaires au sein de ces centres. Aux États-Unis, contrée du libéralisme, ceux-ci sont généralement détenus par de riches entrepreneurs.

Leur objectif premier n’est en aucun cas l’épanouissement de l’enfant, mais le profit ; d’où les campagnes publicitaires et de marketing qu’ils développent, et trompent sciemment les parents ayant un enfant « en difficulté ».

… allant au-devant de la scène

Paris Hilton a ainsi défendu devant le congrès l’adoption du Stop Institutional Child Abuse Act. Présenté en avril 2023 par plusieurs sénateurs, ce projet, qui toujours non adopté depuis, devrait mettre fin à ces maltraitances institutionnelles. Il y aurait chaque année entre 120.000 et 200.000 jeunes envoyés dans ces centres.

Plus d’infos : www.stopinstitutionalchildabuse.com

Des bébés placés …

Réalisé par Karine Dusfour et produit par Mélissa Theuriau pour le magazine Infrarouge, Bébés placés, la vie devant eux est un documentaire se consacrant à l’accueil des nourrissons placés dans les pouponnières.

Ces jeunes bébés sont placés à la demande des parents (incapables de survenir correctement à leur besoin), ou à la suite d’une décision de justice (pour négligence ou maltraitance), voire abandonnés.

En France, près de 10.000 bébés (un peu moins de 2 % des naissances) seraient ainsi placés en pouponnières.

… mais pouponnés

Le film, en retraçant pendant plusieurs mois le parcours de deux nouveau-nés, s’intéresse ainsi à leur évolution : comment des enfants éloignés de leurs parents aussi prématurément se développent-ils ? N’ayant aucune affection familiale, les bébés sont choyés afin de réparer les traumatismes liés à la séparation.

Toute une équipe qualifiée s’en occupe en permanence. Malheureusement, tous ne retournent pas auprès de leurs parents ni n’obtiennent une place dans une famille d’accueil à long terme.


Les bésicles de Jiji

À en avoir le tournis

Soir (24 janvier), « Un tiers des vertiges démarre dans l’oreille ». Donc, un tiers des causes de chaque vertige consiste en un trouble du vestibule ? Absolument pas : l’article explique que cette défaillance ne suscite que 34% des cas. Il fallait considérer « un tiers » comme un adjectif numéral et écrire : « démarrent ». Ou plutôt « se déclenchent », pour laisser aux navires et aux moteurs ce verbe galvaudé.

Luxe fulgurant

Le supplément SOSoir (2 mars) s’extasie sur le train Venice Simplon Orient Express qui propose « un programme d’exception : l’embarquement aura lieu à 17 h. 10 à la gare de Bruxelles-Midi, direction la Suisse (…) jusqu’en Italie où le train finira sa course à 19 h. à la gare Santa Lucia de Venise ». Pour 5000 € le compartiment biplace, Bruxelles-Venise en 1 h. 50 de volupté ? À l’intention des crédules, il aurait fallu préciser que l’arrivée a lieu le lendemain.

… des continents ? d'un avion ?

Le Moniteur du 20 février publie un arrêté ministériel du 2 février 2024 signé par le ministre fédéral de l’Agriculture, D. Clarinval (MR) et « modifiant l’arrêté ministériel du 1er avril 2021 fixant les mesures ou moyens de réduction de la dérive ». Revoici (voir le J.D.J. n° 429, p. 47) les justiciables perplexes conviés à une énigme légistique qui les mène à un arrêté royal du 19 mars 2013 : il s’agit de dispersion (par l’eau ou le vent) des pesticides vers des zones protégées.

Et on continue, mais dans le féminisme

Même organe officiel (8 mars), un arrêté royal du 29 février 2024 fixe « la liste des activités qui ont trait à la vie quotidienne et les conditions auxquelles ces activités doivent répondre pour être considérées comme telles ». F. Vandenbroucke (Vooruit), ministre fédéral de la Santé publique, quel à-propos pour la Journée des femmes ! En exécution de la loi relative aux professions des soins de santé, coordonnée le 10 mai 2015, la liste concerne des tâches au bénéfice de personnes qui ne peuvent les accomplir elles-mêmes, et qui peuvent être confiées à des « non-professionnels de la santé ». Vous voyez qui.

Demi-tour !

Ibidem (11 mars), notre infatigable pourvoyeur, Ph. Hrenry (Ecolo), ministre wallon de la Mobilité, réagit à une pollution par PCB avec un arrêté du 26 février 2024 qui « suspend temporairement la circulation de toutes les embarcations sur la Semois » et qui « entre en vigueur le jour de sa signature ». Quiconque y a contrevenu (pendant 15 jours, donc) doit retourner d’où il venait.

Ça tombe dru

  • Le Soir (23 février) livre un billet de Belga qui rapporte qu’en France, « la tempête a provoqué la mort d’un automobiliste noyé dans sa voiture dans les Deux-Sèvres ». Lisez la phrase tout haut et vous croirez à un malheureux exploit.

  • Aussi (27 février), un titre : « ONU – Israël accablé pour le blocage de l’aide humanitaire ». Sans doute pas de remords, et sûrement moins que les Gazaouis.

  • Itou (6 mars), un billet de l’AFP signale que près de Londres, la princesse Kate a été vue « chaussée de lunettes de soleil, passagère d’un véhicule conduit par sa mère ». De plus en plus alarmant.

  • Encore (16 mars), l’éditorialiste estime que les trois États qui forment le « triangle de Weimar » (France-Allemagne-Pologne) « sont un axe crucial de la stratégie de défense européenne ». Laquelle peine à tourner rond.

  • De plus (15 mars), au débat de la Chambre concernant les répugnantes pratiques de nos guerriers, un député Ecolo : « Que des faits aussi graves aient pu passer sous le radar ». La furtivité, impératif des armées modernes. Et le journal pose la question insoluble : « Le génie militaire, qu’est-ce que c’est ? ».

  • À Elle (éd. France, 7 mars), l’actrice Alexandra Lamy déclare : « Mon corps est mon deuxième cerveau, je suis très là-dedans ». Quel soulagement.

  • Le site de Matélé signale (11 février) qu’en septembre, le MR et la liste IC de Ciney avaient annoncé leur union « en grandes pompes », mais qu’ils l’ont déjà rompue. Ils sont donc dans leurs petits souliers ? La pompe pas funèbre s’écrit au singulier.

  • Au Journal de 23 h. de VivaCité (28 février) : « À La Louvière, éteindre l’éclairage public la nuit a permis à la ville de faire des économies sans voir une augmentation de la criminalité ». Quelque chose n’est pas clair dans cette phrase.

  • Celui de 19 h. sur La Première (4 mars) fait entendre G. Attal devant le Congrès français réuni pour inscrire le droit à l’IVG dans la Constitution ; il évoque « les femmes qui devaient se rendre à l’étranger, la peur au ventre ». Pas seulement…