"Ici et ailleurs" du JDJ N°375

Mondial 2018 : Anti-jeu sur le salaire vital

Alors que des millions de supporters ont les yeux rivés sur le petit écran, le rapport «Anti-jeu 2018» révèle que les dizaines de milliers de femmes qui fabriquent les maillots et chaussures de foot gagnent un salaire de misère, alors que Nike et Adidas les vendent au prix fort.

Les travailleuses de la confection (80% sont des femmes, bien entendu) en Indonésie gagnent entre €82 et €200 par mois (moins que le salaire minimum légal de €363), salaire qui ne couvre pas leurs besoins de base, et ne permet évidemment pas de leur assurer une vie décente, ainsi qu’à leur famille (elles gagnent en 1 mois moins que le prix d’1 seul maillot).

Soutenez les travailleuses indonésiennes et écrivez un mail à Nike et Adidas : www.achact.be/Archives-events-45-agir.htm.

Du pain et des jeux, c’est uniquement pour les supporters occidentaux qui peuvent se payer un T-Shirt à un prix inférieur à un mois de salaire de celle qui l’a fabriqué.

Déontologie journalistique…

Le Conseil de déontologie journalistique a adopté deux avis (le 30/04/18) sur plainte à propos de l’identification d’une jeune fille mineure.

La première est déclarée partiellement fondée (17-47 At- MOsphères AMO c. RTL-TVI & RTL.be), concernait une séquence du JT de RTL-TVI et l’article en ligne qui rendaient compte du retour en Belgique d’une jeune adolescente disparue en mai 2017, que la police soupçonnait d’être partie pour la Syrie.

La plaignante déplorait la diffusion de la photo de cette jeune fille qui permettait son identification, alors qu’elle était placée en détention dans une institution publique de la protection de la jeunesse (IPPJ) : elle estimait que, puisqu’elle avait été retrouvée, elle aurait dû être protégée par son anonymat.

…identité d’une mineure,…

Dans son avis, le CDJ a reconnu l’intérêt général de l’information, mais pas celui de l’identification. La prudence requise en matière d’identification des mineurs prévalait dès lors que l’information relayée laissait apparaître que la jeune fille faisait désormais l’objet d’une mesure de placement en IPPJ et que les circonstances de son départ et de son retour, bien que liées au contexte terroriste, n’étaient pas de nature à justifier qu’il soit passé outre ses droits.

Pour autant, le CDJ n’a pas jugé que les articles 24 (droit à l’image), 25 (respect de la vie privée) et 27 (attention aux droits des personnes en situation fragile) du Code de déontologie journalistique avaient été enfreints.

…négligence et circonstances atténuantes

L’identification de la mineure relevait dans ce cas d’une négligence du média qui bénéficiait de circonstances atténuantes : l’identification intervenait à la suite de la large diffusion, par une autorité publique, du nom et des photos de l’adolescente et le média avait rectifié son erreur en retirant la séquence et l’article de son site et en floutant la photo de la jeune fille.

Le Conseil a cependant retenu que cette rectification n’était pas explicite, comme prévu à l’art. 6 du Code de déontologie : elle n’était ni claire, ni visible et la raison n’en avait pas été donnée au public qui n’avait pu dès lors en prendre connaissance. En conséquence, le CDJ a déclaré la plainte fondée sur ce point uniquement.

La bible a bon dos

Le ministre de la Justice des États-Unis se réfère à la bible pour justifier la politique de l’administration Trump en matière de séparation des familles migrantes. Il ne précise pas si c’est aussi dans la bible qu’il est écrit qu’il faut mentir aux enfants en disant qu’ils vont prendre une douche pour permettre la séparation «sans heurts» de la famille (voyez le rapport de Michael Bochenek de Human Rights Watch sur : www.hrw.org).

Tiens, c’est pas ce que les nazis utilisaient aussi comme argument ?

Jouissons sans entrave

De nouvelles sanctions administratives (sur le modèles des SAC communales) ont été instaurées pour réprimer les voyageurs qui prennent le train sans titre de transport, mais aussi les mendiants (dans les trains) et personnes qui mendient «de manière envahissante ou agressive» dans les gares, les gens qui «se trouvent» sur un quai sans titre ou sans accompagner ou attendre un voyageur ou les gens qui ont «un comportement, de quelque nature que ce soit, susceptibles d’empêcher les voyageurs de jouir sans entrave des services du gestionnaire de la gare ou des services de transport ferroviaire» (distribuer des tracts, sensibiliser pour une action, donner à manger aux sans-abris, filmer des interventions policières,… c’est empêcher de jouir sans entrave ?).

Cerise sur le gâteau : le montant des amendes est encaissé par la société de transport. Loi du 27 avril 2018 sur la police des chemins de fer (M.B. 29/05/2018). Sous les pavés, les rails ?

PIA, DYS, PMS, KESAKO ?

Qu’est-ce qu’un PIA ? Un plan d’intégration ? Des aménagements raisonnables ? Que faire quand on est face à une orientation inadéquate ? Qu’est-ce que les DYS ? Quelle est la fonction du PMS ? Si vous avez des doutes, précipitezvous sur le Webdoc d’Infor Jeunes Laeken sur l’École inclusive. Rejoignez Marie- Dounia, leur ado égérie de la mixité sociale et de l’école de la réussite pour tous !

Elle vous montrera le chemin vers l’École inclusive.

Mais pour comprendre l’inclusion, il faut aussi savoir mettre en perspectives les inégalités et les mécanismes de relégation. Et remettre sur le tapis, la place des parents !

Webdoc «en chemin vers l’école inclusive».

Mise en conformité

La Convention (n° 138) de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) sur l’âge minimum, ratifiée par la Belgique en 1988, traite de l’élimination du travail des enfants et de la protection des enfants et des jeunes.

L’article 3 de cette Convention permet de travailler dès l’âge de 16 ans (à condition que la sécurité, la santé et la moralité du mineur soient garanties de manière adéquate).

Or, en Belgique, l’AR du 3 mai 1999 relatif à la protection des jeunes au travail permet aux jeunes travailleurs (y compris tous les travailleurs mineurs âgés de 15 ans ou plus qui ne sont plus soumis à l’obligation scolaire à temps plein) d’effectuer certaines tâches dangereuses.

C’était contraire à la Convention sur l’âge minimum, qui fixe l’âge minimum à 16 ans. Heureusement, à la demande d’experts du Bureau international du travail (BIT), un AR du 31 mai 2016, a modifié cet état de fait pour fixer l’âge à 16 ans. Il aura juste fallu attendre 30 ans.


Les bésicles de Jiji

Un pays peu commun

La Belgique doit être le seul État du monde dans lequel lorsque « La NVA exige des soignants bilingues à Bruxelles » (titre en « Une » du Soir, 16 mars), sa proposition de loi « communautarise la question des soins de santé » (sous-titre). Le concept même de « Communauté » à la sauce belge n’implique-t-il pas qu’au contraire, chacune ait sa langue ? En plus, on lit aussitôt que, de source MR (anonyme), « S’il y a des accents communautaires [dans le projet de loi sur les soins de santé que prépare M. De Block, VLD], nous nous y opposerons ». Limbourgeois, marolliens, liégeois ? À force d’appeler n’importe quoi n’importe comment, nous aboutirons n’importe où n’importe quand.

Tous des porcs

Un sous-titre de cette gazette (24-25 mars) : « Forest – [Le bourgmestre] se défend d’avoir fauté sur une affaire de mœurs ». Lors d’un voyage scolaire, une petite fille aurait été victime d’un viol, et de nombreux parents enragés reprochent à la commune de traiter l’information par le scepticisme. Ce n’est pas une raison pour laisser entendre que le premier édile a lui-même trempé dans un crime.

Que la bête meure (C. Chabrol)

Le 20 février 2018 (n° 240.757), le Conseil d’État a rejeté le recours d’un agent communal contre la sanction disciplinaire qui le frappait. Lors d’une réunion, le requérant, délégué syndical, avait violemment injurié la bourgmestre et la secrétaire communale. On lit dans l’arrêt que peu après, l’organisation du personnage (non, ce n’est pas la CGSP) avait écrit à la mayeur : « Nous tenons à vous présenter nos excuses pour le comportement déplacé de Monsieur (XXX) qui n’avait pas lieu d’exister (…) L’intéressé a été suspendu de ses fonctions de délégué (…) ». Mais pas par le cou.

Vague Arthur ?

Dans ses avis, le même Conseil d’État ne se prive pas de corriger aussi le style des pauvretés que lui soumettent les autorités, et ce n’est pas JiJi qui le lui reprochera. On lit donc avec volupté dans le Moniteur du 22 mars une communication : « Conseil d’État – Vacature – Un mandat d’assesseur d’expression française est prochainement à conférer auprès de la section de législation ». Malgré son aspect fransquillon, le terme est puur Nederlands et n’a aucun titre à remplacer « Avis de vacance ».

Ça tombe dru

  • Touring Magazine (mars-avril) vante une mini-croisière en Méditerranée : « … lorsque le Costa Favolosa jettera l’ancre dans la petite ville italienne de Savone ». Encore plus fort que son défunt frère, le Costa Concordia.
  • Elle (éd. France, 16 mars) et les émois écologiques du chanteur israélien A. Avidan : « Je me suis déjà acheté les bottes en caoutchouc ! Cette connexion avec les plantes et les animaux m’est indispensable. » La méthode semble perfectible.
  • Le Soir (17-18 mars) enquête sur le « parcours de la viande » : « L’artisan-boucher choisit uniquement des vaches de sexe féminin ». Et l’affirmation de genre, alors ?
  • Ibidem (20 mars), F. Balace (Université de Liège) au sujet des futures études supérieures que la royale héritière suivra à l’étranger : « Cela permet d’éviter de choisir entre un réseau libre ou catholique ». Ciel ! une tentation de préférer Bruxelles/Brussel à Leuven/Louvain ?
  • Encore (22 mars), en Wallonie, les professionnels de l’expérimentation animale craignent que leurs établissements puissent être visités par « des associations de protection des animaux extrêmes’ ». Si leurs délégués débarquaient avec un éléphant ou une baleine
  • Itou (23 mars), le ministre de la Défense, S. Vandeput (NVA) « pratique la plongée à un haut niveau ». Pour s’élever jusqu’au fond du dossier des avions (J.D.J., n° 372, p. 47).
  • De plus (26 mars), le plan de la manifestation des taxis qui bloquera, entre autres, « l’avenue Charlequin ». Le Carnaval est passé, pourtant.
  • En outre (27 mars), le député G. Gilkinet (Ecolo) et le Kazakhgate : « Plus on approchera du noyau nucléaire du dossier, plus ce sera compliqué ! ». Ou de son centre central.
  • >Enfin (3 avril), une bonne nouvelle : « Le cheval remis en selle en forêt de Soignes pour le ramassage des déchets ». On cherche un cavalier costaud.
  • Dans SOSoir, supplément snob (17 mars), la restauratrice I. Arpin : « Les événements me mangent beaucoup de temps ». Ces cuisiniers ne pensent qu’à ça (J.D.J., n° 370, p. 47).
  • Là aussi (24 mars), le chanteur Baloji se dit « accroc aux réseaux sociaux ». C’est « accro », bien sûr ; il ne les lacère pas. Fake news !
  • Restons-y (31 mars) avec B. Louys, marchande de bijoux : « Ce restaurant est pour moi une vraie madeleine de Proust », cuisine légère. Aussi une escapade à Nantes : « [La boutique] Passage 31 pour ses parfums de niche », il y a des obsédés de l’odeur du chien mouillé.
  • Les Novelles (canard des étudiants en droit de l’ULB, mars 2018) interviewent J.-P. Buyle, président d’«Avocats.be» : « (Parmi nos priorités), il y a sûrement l’accès à la justice des plus démunis ». Ce qui confirme qu’il y en a une des mieux nantis.
  • Au Journal parlé de la RTBF-Radio (1er avril, 23 h.), sur la mort d’une petite fille tombée du 3ème étage : « La police judiciaire est descendue sur les lieux ». Les mots qu’il fallait.