LE JOURNAL DU DROIT DES JEUNES

L'éditorial de Benoit Van Keirsbilck dans le JDJ N°345

Abject !

L’attitude de FEDASIL, et dans la foulée de l’ensemble des autorités qui se défaussent de leurs responsabilités, est tout simplement abjecte. Jeter des familles avec enfants à la rue, sous prétexte qu’elles n’auraient pas droit à une aide, est inadmissible. Certains ne semblent pourtant pas incommodés à la vue d’enfants campant dans un parc dans des conditions indignes.

Peut-être suffit-il de détourner le regard et de trouver des justifications juridiques à cette maltraitance institutionnelle organisée et caractérisée pour se donner bonne conscience ?

Pourtant, comment peut-on s’habituer à l’intolérable ? Et quelles pseudo-justifications permettent-elles de laisser des enfants vivre dans ces conditions, même en été ?

La Cour constitutionnelle, qui a pourtant permis toutes les dérives dans la limitation du droit inconditionnel à l’aide sociale, avait rappelé en 2003, s’agissant d’enfants en séjour irrégulier, que : «Une aide sociale doit pouvoir être accordée à la triple condition que les autorités compétentes aient constaté que les parents n’assument pas ou ne sont pas en mesure d’assumer leur devoir d’entretien, qu’il soit établi que la demande concerne des dépenses indispensables au développement de l’enfant au bénéfice duquel elle est formulée et que le centre s’assure que l’aide sera exclusivement consacrée à couvrir ces dépenses. » (Arrêt 2003-106 du 22 juillet 2003).

Donc, même si la forme d’aide peut varier, le principe d’une aide à charge des pouvoirs publics est intangible, même si elle est octroyée en nature. C’était d’ailleurs ce dont bénéficiaient ces familles, mises à la porte d’un centre FEDASIL du jour au lendemain sans que les pouvoirs publics ne leur proposent une solution. Ce n’est pourtant pas le manque de place qui a justifié cette décision puisque les chambres occupées par ces familles sont restées vides.

C’est ce constat qui aura amené le juge des référés, statuant en urgence, d’ordonner l’accueil d’une des familles (les autres ayant joué de malchance en n’ayant pas la possibilité d’agir aussi vite).

Mais le fond du problème est d’une part, l’absence de droits garantis à des familles originaires de pays d’Europe, et d’autre part, le traitement discriminatoire à l’égard des Roms et l’absence de soutien et de suivi de ces familles pendant les périodes d’accueil ; après des mois d’accueil au sein de FEDASIL, aucun suivi digne de ce nom, susceptible d’apporter des solutions à terme, n’a été mis en place. C’est trop facile de laisser une situation perdurer puis de jeter des êtres humains à la rue faute de solution structurelle.

En attendant, Leila* se lève tous les matins pour aller à l’école malgré ses conditions de vie. Qu’est-ce que je ferais d’autre ? dit-elle, mi-fière, mirésignée.