LE JOURNAL DU DROIT DES JEUNES

L'éditorial de Benoît Van Keirsbilck dans le JDJ N°332

Quand les « lignes » bougent

L’avenir nous dira s’il s’agit d’un fait réellement marquant : le congrès électoral du sp.a a approuvé le 22 février un amendement des Jeunes socialistes flamands visant à légaliser la vente, la détention et la consommation de cannabis (il ne manquera plus que la culture qui semble toujours interdite dans l’esprit des jeunes socialistes, ce qui est bien sûr toujours aussi paradoxal, comme on peut le voir aux Pays-Bas où les voix s’élèvent pour la légaliser aussi).

Pour les initiateurs de l’amendement, la mesure doit permettre de décriminaliser la vente, de mieux contrôler la composition de la drogue et d’investir dans la prévention et l’information.

Certes, la motion a été adoptée à une courte majorité et contre l’avis de la hiérarchie du parti; il n’en reste pas moins que cette revendication fait maintenant partie du programme du parti socialiste flamand. Dans quelques années, ces jeunes militants seront aux commandes du parti et pourront promouvoir la mesure avec plus de poids… s’ils ne sont pas rentrés dans le rang d’ici-là !

Les lignes (sans mauvais jeu de mot) bougent dans d’autres partis aussi puisque, entre autres, les jeunes MR se sont prononcés dans le même sens (d’autres sections jeunesse des partis ont cette même revendication, parfois depuis fort longtemps).

Des évolutions se font aussi sentir au niveau international; en décembre dernier, l’Urugay approuvait un projet de loi visant à créer un marché réglementé du cannabis. Le Colorado et l’Etat de Washington (oui, aux Etats-Unis !) viennent quant à eux de légaliser l’usage récréatif de la marijuana. Nombre d’autres pays, au nombre desquels la Belgique, ne poursuivent plus quand il s’agit d’un usage « non problématique » pour sa consommation personnelle.

Les arguments des tenants et opposants sont connus : moyen pour mieux contrôler et prévenir pour les uns, incitation à la consommation pour les autres. La dangerosité du produit et l’accoutumance qu’il provoque font toujours l’objet de discussion entre scientifiques, mais ce débat rejoint celui des risques pour la santé de l’abus d’alcool et encore plus du tabac, qui ne font pas l’objet des mêmes interdictions.

Les méfaits de la prohibition sont, eux, prouvés et les moyens policiers et pénaux mis en oeuvre pour contrer les délinquants (moyens qui atteignent rarement les réseaux mafieux qui continuent à sévir) empêchent sans doute de développer une politique de prévention digne de ce nom.

En ce non compris les descentes de police avec des chiens renifleurs dans les écoles !

Le vote intervenu au congrès de la SP.a permet à tout le moins de sortir de l’hypocrisie et entrouvre la porte d’un débat de société sur cette vaste question. Puisse-t-elle ne pas se refermer trop vite !