LE JOURNAL DU DROIT DES JEUNES

L'éditorial de Benoît Van Keirsbilck dans le JDJ N°250

Une nouvelle bavure de l'Office des étrangers

Le 8 novembre dernier, une jeune fille mineure non-accompagnée, son compagnon et leur enfant de vingt mois (ainsi que d'autres membres de cette famille), tous originaires de Roumanie, ont été expulsés par un vol militaire à destination de la Roumanie.

Cette situation laisse apparaître de nombreuses et graves irrégularités dans le traitement du dossier par l'Office des étrangers.

Premièrement, la jeune fille a été entendue seule dans le cadre de sa demande d'asile. L'Office n'a pas, comme le prévoit la loi relative à la tutelle des mineurs non-accompagnés, informé le Service des tutelles pour que celui-ci désigne un tuteur.

Ce n'est que bien plus tard dans la procédure que cette démarche a été faite et qu'une tutrice a été désignée. Pendant ce temps, la jeune fille, son compagnon et leur enfant ont été détenus au centre 127 bis.

Par la suite, probablement en vue de préparer leur expulsion, l'Office a soumis à la signature de la jeune fille un document par lequel elle renonçait à sa demande d'asile. Ce document porte le nom de plusieurs membres de cette famille dont l'enfant de vingt mois qui apparaît donc avoir renoncé à sa demande d'asile !

La signature de ce document a été faite hors la présence de la tutrice et de l'avocate de la mineure et manifestement sans assistance d'un traducteur. Il n'a pas été compris pas l'intéressée qui ne savait pas ce qu'elle signait. L'Office lui a cependant affirmé que c'était en vue de sa libération ! Ce document n'a pas non plus été communiqué à la tutrice et à l'avocate qui n'en ont eu connaissance que par hasard.

Pourtant, un recours urgent contre la décision d'irrecevabilité de l'Office avait été introduit et était en cours de traitement au Commissariat général. Une procédure de libération était également en cours.

Malgré ces éléments, la tutrice est prévenue le 7 novembre en soirée de l'expulsion du lendemain par … un message sur sa boîte vocale. Ceci aussi fait partie des méthodes détestables de cette administration.

Enfin, pour couronner le tout, il n'y a aucune information concernant les garanties prises par l'Office des étrangers pour organiser un accueil adéquat de cette jeune fille et son enfant dans un pays qu'elle avait quitté deux ans plus tôt.

Pourtant, le juge des référés de Bruxelles avait interdit à l'État belge, le 17 novembre 2003, de procéder encore à l'expulsion de mineurs non accompagnés sans garanties d'accueil dans le pays d'origine.

L'Office nous a habitué à tenir peu compte de la légalité. Ici, de nouveaux sommets ont été atteints dans le non respect de règles fondamentales d'un état de droit. Nul doute que l'État belge aura des comptes à rendre.

Au vu de ce qui précède, on ne peut que se réjouir, pourvu que le projet de réforme de la procédure d'asile soit finalement adopté par le Parlement, que l'Office se voie retirer la majorité de ses compétences en matière de procédure d'asile (il garderait néanmoins la première étape qui concerne la détermination de l'État responsable de la demande d'asile).

Cet exemple n'est pas digne d'un état démocratique mais s'apparente au mode de fonctionnement d'un état totalitaire.