"Ici et ailleurs" du JDJ N°361

Au nom de l’enfant

Nouvelle règle pour l’attribution du nom de famille de l’enfant (ajout à l’art. 335 du C.c.) : «En cas de désaccord, l’enfant porte les noms du père et de la mère accolés par ordre alphabétique dans la limite d’un nom pour chacun d’eux. Lorsque le père et la mère, ou l’un d’entre eux, portent un double nom, la partie du nom transmise à l’enfant est choisie par l’intéressé. En l’absence de choix, la partie du double nom transmise est déterminée selon l’ordre alphabétique» (Loi du 25/12/2016 modifiant les articles 335 et 335ter du Code civil relatifs au mode de transmission du nom à l’enfant – M.B. 30-12-2016).

Le pouvoir mystificateur des mots

Il n’est pas sûr qu’en Australie, ils connaissent M. van de Kerchove, l’inventeur de ce concept («Des mesures répressives aux mesures de sûreté et de protection. Réflexions sur le pouvoir mystificateur du langage », RDPC 1976-77, pp. 245-279), mais ils savent très bien le mettre en oeuvre. 24 heures après que la Cour d’appel de Victoria ait considéré qu’il était illégal de transférer un mineur dans la prison de haute sécurité pour adultes, le Gouvernement australien a trouvé la parade : il a rebaptisé la prison en centre de détention pour jeunes. L’inadaptation des lieux, l’utilisation abusive de la mise en isolement, les toutes petites cellules, la limitation du temps en extérieur ou pour des activités, l’abus d’utilisation des menottes, n’ont pas disparu pour autant. Lapin, je te baptise carpe et le tour de passe-passe est joué.

On fait n’importe quoi …

Le Conseil d’État s’est montré très critique par rapport à la proposition de loi de la N-VA obligeant les travailleurs des institutions de sécurité sociale à dénoncer au procureur du Roi tout indice de l’existence d’une infraction terroriste et mettant à néant le secret professionnel des travailleurs sociaux (Alter Echos n° 435, du 20/12/2016).

Il aurait suffi d’indices d’infractions terroristes, sans autres précisions. «L’obligation générale de communiquer des renseignements et pas seulement celle liée à une infraction terroriste existante… aurait un champ d’application à ce point étendu qu’elle affecterait le secret professionnel dans sa substance». Conclusion : l’État doit remettre l’ouvrage sur le métier ; gageons que ce n’est pas la dernière tentative.

… au nom du terrorisme

Et la Cour constitutionnelle (qui exerce un contrôle a posteriori) se montre très restrictive en ce qui concerne d’éventuelles exceptions au secret professionnel :(C. cst n° 127/2013 du 26 septembre 2013 et 163/2013 du 5 décembre 2013) : «le secret professionnel auquel sont astreintes les personnes visées à l’article 458 du Code pénal n’entend pas leur conférer un quelconque privilège, mais vise, principalement, à protéger le droit fondamental à la vie privée de la personne qui se confie, parfois dans ce qu’elle a de plus intime».

Pas cons, les mecs

Dans la série «on n’arrête pas le progrès» : une célèbre marque d’ordinateurs propose aux écoles des sorties «pédagogiques» dans leurs magasins. Voir : www.francetvinfo.fr/societe/education/demain-vos-enfants- feront-peut-etre-unesortie-de-classe-dans-un-applestore_1978659.html.

La marchandisation de l’enseignement est bien en marche.

Droits de l’enfant, au-delà du bla-bla

La Région wallonne adopte son plan d’action 2016-2019 relatif aux droits de l’enfant, fruit d’un long processus de concertation.

Il contient les axes suivants : la lutte contre les inégalités sociales et la discrimination, l’information, la formation et l’éducation aux droits de l’enfant, la participation et la gouvernance. La mise en oeuvre est coordonnée par Maxime Prévot, l’évaluation pilotée par l’Observatoire de l’enfance, de la jeunesse et de l’aide à la jeunesse.

On aime à croire que les droits de l’enfant en Wallonie sont dans de bonnes mains.

L’adolescence des droits de l’enfant

Le Comité des droits de l’enfant des Nations unies vient d’adopter son Observation Générale n° 20 relative à la mise en oeuvre des droits de l’enfant durant l’adolescence.

Cet instrument se focalise sur les 10-18 ans et vise à mettre en avant les défis et opportunités que peuvent rencontrer les adolescents, notamment dans les domaines de la protection de remplacement et de l’adoption. Les adolescents bénéficiant d’une mesure de prise en charge alternative sur le long terme sont plus exposés à des difficultés telles qu’un faible taux d’éducation, une dépendance aux services sociaux, des grossesses non-désirées ainsi que l’abus de substances (alcool, médicament ou drogue illicite). Les enfants qui atteignent la majorité et qui doivent quitter leur lieu de vie sont particulièrement vulnérables et doivent être préparés à cette transition à travers un soutien dans la recherche d’emploi et de logement mais aussi au niveau psychologique et en vue de la réintégration au sein de leur famille.

Pour plus d’information, voir : www.ohchr.org/ EN/HRBodies/CRC/Pages/CRCIndex.aspx (rubrique «General comments»).

Centres fermés : dix ans après

Diverses associations de défense des droits des étrangers (Caritas international, le CIRÉ, Jesuit refugee service, la Ligue des droits de l’Homme, le MRAX et Vluchtelingenwerk Vlaanderen) viennent de publier un nouvel état des lieux des centres fermés en Belgique, dix ans après le précédent. Le constat est à nouveau très clair : la détention administrative porte atteinte aux droits et à la dignité humaine. En une décennie, la situation s’est même aggravée : recours arbitraire au régime d’isolement, témoignages de cas de violences physique et psychologique de la part du personnel, prolongation excessive de la détention (25% des détenus sont restés enfermés plus de deux mois), séparation des familles.

Le manque de transparence des centres fermés est aussi un problème en ce qu’il favorise les dérapages. Et de plaider pour un mécanisme indépendant et efficace de contrôle. Bref, le Mécanisme national de prévention (MNP) que la Belgique s’est engagée à mettre en oeuvre depuis des années, en application d’un Protocole additionnel à la Convention contre la torture (l’OPCAT). Mais la tuyauterie institutionnelle belge est manifestement trop complexe.

Voir : www.cire.be.

Eurodac : contraindre pour protéger ?

L’Union européenne travaille sur un développement de sa base de données Eurodac pour élargir son champ d’application, y inclure les scans du visage, les empreintes digitales et d’autres données et l’appliquer à partir de 6 ans (contre 14 auparavant).

Ceci en vue de faciliter l’identification, pour prévenir des «déplacements secondaires» de demandeurs d’asile, augmenter et accélérer les refoulements de migrants, identifier et pister les migrants en séjour irréguliers.

Le système comprendrait des moyens coercitifs pour obtenir les données (empreintes…), en ce compris la détention, mesure également applicable aux mineurs. Pour faire passer la pilule, elle invoque aussi la protection des enfants contre les risques de trafic ou disparitions.

Voir : https://euobserver.com/justice/136224

Les raisons de la colère

Ça grogne grave chez les avocats Bajistes qui considèrent que leurs représentants (en gros, les Ordres) se sont faits littéralement entuber dans le cadre des négociations concernant la réforme de l’aide juridique (la revalorisation du point est encore une chimère pour longtemps). Ils constatent qu’ils n’ont aucun lieu pour exprimer leurs griefs et sont infantilisés par leurs édiles toujours persuadés qu’imposer une contribution de 20 € par procédure est une avancée pour l’accès à la justice et toujours confiants envers le ministre de la Justice parce que c’est un avocat.

Il est peu probable que parmi les avocats qui négocient avec le ministre, ou ceux qui siègent au Parlement ou dans des cabinets ministériels, il y en ait beaucoup qui acceptent des dossiers dans le cadre de l’aide juridique (à part peut-être Monsieur De Decker, pour plagier Renaud dans “Miss Maggy”).


Les bésicles de Jiji

Le Prix 2017 des Bésicles opaques

L’Union européenne s’impose comme lauréate. La publication (au Moniteur du 24 novembre, 2ème éd.) d’une loi (28 octobre 2016) de transposition rappelle qu’elle aussi enrichit chaque jour l’art de la communication : «Directive 2010/64/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 [ceux de ce jour-là, donc ?] relative au droit à l’interprétation et la traduction dans le cadre des procédures pénales et de la Directive 2012/29/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 [pas les mêmes, donc ?] établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité et remplaçant la décision-cadre 2001/220/JAI». Sauvées !

Ils sont mouillés

Les «zones de secours» groupent aujourd’hui les services d’incendie jadis organisés séparément par plusieurs communes : par exemple, Namur, Andenne, Gembloux, Éghezée. C’est ainsi que, par son arrêt n° 236.263 du 25 octobre 2016, le Conseil d’État a mis à néant un arrêté du ministre fédéral de l’Intérieur qui annulait la délibération du conseil de la zone N.A.G.E. «relative à la fixation du règlement hommes grenouilles». Un vrai coâc.

Superboba

Elle (éd. française, 2 décembre) nous décrit la journée de Lisa Eldridge, «make-up artist» anglaise. Levée à 7 h. 15, elle est au travail à 9 h., mais avant, «Deux fois par semaine (…), je marche une dizaine de kilomètres (…) pour me détendre».

En bondissant comme un kangourou ? Et plus fort : «Je voyage (…) au Japon d’où je reviens avec des tonnes de faux cils». Par mer, vu le volume.

Le Père Noël est sans montures

Au Journal parlé de la RTBF (12 décembre, 18 h.), une «mauvaise nouvelle» pour la distribution de cadeaux : les rennes du Svalbard maigrissent, leur poids moyen est tombé de 55 à 45 kg. Ce qui suggère que ce vieux radin se fait tirer par de pauvres bêtes grosses comme des bergers malinois. Pas du tout : les rennes du Svalbard (nom norvégien et actuel du Spitzberg, incultes !) sont une sous-espèce naine. Or, chaque enfant sait que le céleste cocher réside en Laponie, où l’espèce continentale est deux à trois fois plus costaude que sa petite cousine insulaire. Rassurez Gaia.

Ça tombe dru

  • Le Soir (22 novembre) annonce qu’à l’égard de la directive européenne relative au temps de publicité à la télévision, les Communautés flamande et française ne sont pas «sur la même longueur d’ondes». Ah, la VRT et la RTBF dans le même canal qu’on appellerait INR…
  • Justement, au Journal parlé (encore ! 27 novembre, 8 h.), sur F. Castro et Cuba : «cette petite île des Antilles». C’est la plus grande de l’archipel : 111.000 km². On doit savoir sortir d’Outremeuse.
  • Et re-Le Soir (7 décembre), «La RTBF fait sa révolution interne». L’administrateur général J.-P. Philippot a donc renoncé à Bye Bye Belgium.
  • Encore (25 novembre), «Les Pays-Bas et la Belgique vont acheter 4 frégates et 12 navires». Pourquoi acquérir pareils rafiots, s’il faut un de ces grands oiseaux pour en guider trois ?
  • Itou, mais dans Victoire, le supplément pipeul (26 novembre), une recette qui ne met pas vraiment l’eau à la bouche : «dos de maigre poilé». Il s’agit d’un poisson à cuire dans la poêle, et non à désopiler.
  • Sur le site du Conseil d’État, les mots-clés de l’arrêt n° 236.575 du 29 novembre 2016 : «
  • De Lijn – Adjudication de tramways à plancher bas – Suspension». Ouf, ils en ont une !
  • La carte de la brasserie Le Grand Café à Bruxelles : «English menu on the backside». Le Brexit induit l’anglophobie la plus grossière.
  • Une critique à l’émission Le masque et la plume de France-Inter (11 décembre, 20 h. 30) : «Monter une pièce de théâtre sur la propagande fondamentaliste islamique témoigne d’une radicalité peu commune». C’est pourtant indispensable.