LE JOURNAL DU DROIT DES JEUNES

L'éditorial de Benoît Van Keirsbilck dans le JDJ N°310

L'arrêté Fonck mis au secret

L'arrêté qui fixe les conditions d'agrément des services d'aide en milieu ouvert (AMO pour les intimes) vient une nouvelle fois d'être modifié par le Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles à l'initiative de la Ministre Huytebroeck.

On se souviendra de la modification obtenue par la Ministre Fonck en 2008 : pratiquement tout le secteur s'y était opposé. L'arrêté Fonck avait trouvé grâce aux seuls yeux du Conseil d’État, qui n'avait vu aucun problème que l’on prévoie dans un même article le respect du secret professionnel et l'obligation d'informer «l’instance de décision, le procureur du Roi ou l’organisme qui a orienté, par simple notification, si une action d’aide est entreprise, poursuivie ou clôturée» ou même de «transmettre à cette instance de décision, au procureur du Roi ou à l’organisme qui a orienté le jeune, une information, y compris écrite, sur les modalités de l’aide apportée au jeune par le service».

Le politique aura donc fait ce que le judiciaire (Conseil d'Etat) n'a pas été capable de faire; beau paradoxe. Cet article aura vécu, le nouvel arrêté revenant à un bien meilleur équilibre et certainement à plus de cohérence, n'en déplaise à certains conseillers d'aide à la jeunesse qui y avaient vu une manière commode d'instrumentaliser les AMO (avec d'ailleurs la complicité active de certaines d'entre elles).

Il comporte aussi une importante nouveauté: la création d'une catégorie d'AMO (à côté de ceux qui proposent un accueil 24h/24) «spécialisées dans l'aide juridique à titre principal». Plus question de dire que les associations qui proposent une aide socio-juridique aux jeunes ne sont pas des «vraies AMO», comme on l'entendait si souvent; elles ont donc réellement leur place, à côté de toutes les autres qui utilisent d'autres outils de travail social. Leur mission spécifique :

  • Dispenser aux jeunes, à leur famille et aux familiers, dans un langage adapté, une information juridique complète et adéquate, leur permettant de mieux comprendre leur environnement légal et social et ainsi de faire des choix et d'agir en connaissance de cause et de les accompagner dans les démarches juridiques et sociales en leur donnant l'occasion de faire valoir leurs droits, y compris le cas échéant par voie judiciaire;
  • Améliorer le statut juridique et social des jeunes, notamment en favorisant ou relayant leur parole auprès des instances politiques et sociales ou en interpellant ces mêmes instances sur leur respect des droits fondamentaux des enfants, des jeunes et des familles;
  • Partager leurs connaissances spécifi ques avec d’autres institutions relevant ou non du secteur de l’Aide à la jeunesse.

Une modification qui a tout son sens pour que le respect du droit des jeunes soit plus qu'un beau discours, et trouve à s'incarner dans la pratique des organisations actives dans l'aide à la jeunesse (et plus largement) jour après jour, aucun service ne pouvant se dispenser de maîtriser un minimum l'outil juridique dans son action sociale.